Le duty free dans les aéroports : autrefois passage obligé, aujourd’hui zone désertée ? Si, naguère, on se ruait sur les parfums, les cigarettes et les chocolats hors taxes avant d’embarquer, ce réflexe n’est plus aussi irrésistible. Plongée dans le phénomène de la chute historique des ventes en boutiques duty free depuis la crise sanitaire.

Le déclin d’un classique du voyage

Il n’y a pas si longtemps, faire la queue à la caisse d’une boutique duty free, c’était aussi normal que de retirer sa ceinture au contrôle de sécurité. Mais un constat frappant s’impose : après la crise sanitaire du covid, les ventes s’effondrent, alors même que le trafic aérien a retrouvé un niveau quasiment identique à celui de 2019. Oui, les avions se remplissent à nouveau, mais les sacs duty free, eux, restent de plus en plus souvent vides.

Le cabinet Kearney a révélé lors du salon Tax Free World Association qu’une décennie de forte et régulière croissance (+9% par an !) s’était brutalement interrompue à cause du covid. Le chiffre d’affaires s’en ressent :

  • La dépense moyenne par passager a chuté de 29 % en 2022 sur un an, passant à 17 dollars contre 24 dollars avant la pandémie.
  • En 2024, cette moyenne tombe à 15 dollars.
  • Les ventes mondiales atteignaient l’année passée 74,1 milliards de dollars, soit une baisse de 13 % par rapport au pic d’avant la crise.

Le duty free, ce n’est clairement plus ce que c’était… mais pourquoi ?

Entre prix décevants et attentes déçues

Les explications ne manquent pas (malheureusement pour les vendeurs) ! D’après l’étude Kearney, les passagers serrent la ceinture pour plusieurs raisons :

  • 64 % se déclarent insatisfaits des prix (et 50 % de l’offre produits).
  • L’inflation générale a rogné le pouvoir d’achat, et celle spécifique des billets d’avion a corsé l’addition du voyage.

En clair : ce qui pesait lourd dans la valise, c’était aussi devenu lourd pour le portefeuille.

Mais ce n’est pas tout ! Il s’agit aussi de l’allocation du temps. De plus en plus de voyageurs, notamment les plus jeunes (générations Y et Z), préfèrent consacrer leur temps d’attente à des activités numériques, plutôt que de flâner dans les allées parfumées (mais apparemment délaissées) des boutiques.

La nouvelle génération et le shopping aéroportuaire : redéfinir la tentation

Les jeunes voyageurs ne boudent pas le duty free juste par snobisme. Non, leurs attentes ont simplement changé ! L’étude note que cette cible grandissante aspire à des offres différentes, et pour 77 % d’entre eux, c’est l’expérience d’achat, bien plus que le prix, qui déclenche une envie d’acheter. Les mots d’ordre sont désormais :

  • Large choix de produits
  • Promotions et prix avantageux, mais surtout ;
  • Expérience d’achat sur mesure, interaction personnalisée, services de qualité

En résumé, les boutiques doivent se réinventer pour redevenir des temples du shopping, et pas seulement des dépôts de cartons remplis de Toblerone géants.

D’ailleurs, l’enquête de Kearney montre que :

  • 37 % des clients achèteraient plus s’il y avait des produits exclusifs
  • 17 % si la livraison était proposée
  • 32 % citent l’expérience comme clé, et 69 % verraient bien leur attente en aéroport transformée en un vrai moment propice au shopping – à condition qu’on les surprenne !

Vers une (r)évolution du retail aéroportuaire ?

Les experts de Kearney, après avoir interrogé 3 500 clients dans dix pays et rencontré plus de quarante dirigeants d’aéroports, compagnies aériennes, distributeurs et grandes marques, sont formels : il faut tout repenser. Les acteurs du secteur ont intérêt à renforcer leur coopération :

  • Partager les données (en toute discrétion, pas question de spammer avec les promos sur le chewing-gum à la menthe !)
  • Construire une offre mieux adaptée
  • Chasser ensemble la morosité commerciale et séduire les générations à venir, avant qu’elles ne désertent (définitivement) les rayons duty free

Conclusion : Le duty free n’est pas condamné à un destin poussiéreux, mais il doit sortir de sa routine. Si les aéroports s’emploient à réenchanter l’expérience client, à adapter leurs offres et à bosser main dans la main, la zone hors taxes retrouvera sans doute sa place de choix… dans la valise (et l’agenda) des voyageurs. Un bon conseil ? La prochaine fois que vous patientez en salle d’embarquement, zieutez les rayons : qui sait, l’expérience shopping pourrait finir par vous séduire…